Sauvegarde du Pays Sacradel
Emile Combes
COMBES (Émile, Justin Louis), né le 6 septembre 1835 à Roquecourbe (Tarn), mort le 24 mai 1921 à Pons (Charente-Inférieure). Sénateur de la Charente-Inférieure de 1885 à 1921. Ministre de l'instruction publique, des Beaux-arts et des Cultes du 1er novembre 1895 au 23 avril 1896. Président du Conseil, Ministre de l'Intérieur et des Cultes du 7 juin 1902 au 18 janvier 1905. Ministre d'Etat du 29 octobre 1915 du 12 décembre 1916.
Fils d'un tailleur devenu plus tard tisserand, Emile Combes fit ses études au petit séminaire de Castres (Tarn) et les poursuivit à Paris à l'école des Carmes. Bachelier en 1851, il entra à la Sorbonne où il se fit recevoir licencié ès lettres. Elève au grand Séminaire d'Albi de 1855 à 1856, il devint professeur au collège de l'Assomption de Nîmes de 1857 à 1860. Il reçut le diplôme de docteur ès lettres en 1860 avec une thèse française : La psychologie de Saint-Thomas-d'Aquin et une thèse latine : La querelle de Saint-Bernard et d'Albélard, après quoi il vint enseigner la philosophie au collège de Pons (Charente-Inférieure) de 1860 à 1862. Il abandonna alors l'état ecclésiastique auquel il semblait jusque là voué, non sans avoir publié un ouvrage élogieux : De la littérature des Pères et de son rôle dans l'éducation de la jeunesse. Se fixant à Paris, il y fit ses études de médecine de 1864 à 1868 et les termina par une thèse sur l'Hérédité des maladies. Il ouvrit son cabinet médical à Pons, où il exerça de 1868 à 1885.
- Il s'y occupa également de politique. Conseiller municipal et maire de Pons en 1874, il entra au Conseil général de Charente-Inférieure en 1879 et le présida de 1897 à 1921. Dès lors, sa rupture avec l'Eglise catholique fut consommée et c'est avec les idées républicaines les plus avancées qu'il se présenta aux élections générales législatives du 21 août 1881 dans la deuxième circonscription de Saintes. Il ne recueillit que 6.924 voix, contre 7.486 à M. Jolibois, sur 14.523 votants.
On sait, par contre, qu'il fut élu sénateur au renouvellement du 25 janvier 1885. A peiné arrivé au Luxembourg, il s'assura vite une des premières places par son inlassable activité et son dévouement à la chose publique. Siégeant au groupe de la gauche démocratique, dont il devint le président, il se spécialisa d'abord dans les questions d'enseignement et s'intéressa également au projet de loi relatif à l'exercice de la médecine (1892). Le 20 novembre 1893, il fut élu vice-président de la Haute-Assemblée.
- Il retrouva son siège de sénateur au renouvellement du 7 janvier 1894, au premier tour de scrutin, par 559 voix sur 999 votants. Réélu vice-président du Sénat dès l'ouverture de la session, il démissionna le 4 novembre 1895 pour prendre le portefeuille de l'Instruction publique, des beaux-arts et des cultes dans le cabinet Léon Bourgeois formé le 1er novembre. A ce titre, il défendit le budget de son ministère et s'intéressa à la constitution des universités (1895 et 1896). Démissionnaire le 23 avril 1896, il assura l'expédition des affaires courantes jusqu'au 29 avril, date de la constitution du Ministère Jules Méline. Revenu à son banc de sénateur, il déposa une proposition de loi sur la réforme des sanctions de l'enseignement secondaire qu'il soutint à la tribune de toute son autorité (1899 et 1900). Au moment de l'affaire Dreyfus, il s'affirma un des partisans les plus déterminés de la révision du procès et entreprit dans le pays, dans la presse et au Parlement, une lutte passionnée pour la "défense républicaine et laïque". Vice-président de la Commission des finances en 1900 et de la Commission de la marine en 1901, il intervint sur le projet de loi concernant les associations. Après les élections générales législatives de 1902 qui marquèrent le triomphe de la politique de Waldeck-Rousseau, celui-ci abandonna le pouvoir et désigna Emile Combes pour lui succéder. Ce fut incontestablement la grande période de sa vie. En même temps que la présidence du Conseil, il prit le portefeuille de l'Intérieur et des Cultes et ne se contenta pas de poursuivre la politique de son prédécesseur ; il l'accentua fortement dans le sens de la lutte anticléricale. S'appuyant sur la loi du 1er juillet 1901 sur les congrégations non autorisées, il en poursuivit inexorablement l'application pour arriver à la suppression complète de l'enseignement congréganiste. Il s'appuya sur une majorité républicaine et laïque appelée "Le Bloc" composée des éléments socialistes, des groupements d'instituteurs et de la franc-maçonnerie. Il fit ainsi fermer des centaines d'établissements enseignants et fit repousser par la Chambre les demandes présentées par les congrégations non autorisées pour obtenir l'autorisation. Il fit enfin voter, le 7 juillet 1904, la loi qui interdisait l'enseignement à toutes les congrégations. La rigueur qu'il apporta dans l'application de cette loi amena Waldeck-Rousseau lui-même à protester, vainement d'ailleurs, car il n'admettait pas que l'on transformât une loi de contrôle en loi d'exclusion. Il entra ensuite dans un violent conflit avec le pape au sujet de la nomination des évêques de Dijon et de Laval et finit par rompre les relations diplomatiques avec le Vatican. Il entreprit alors la séparation des Eglises et de l'Etat, mais n'eut pas le temps de mener son projet à bien. Son cabinet fut en effet obligé de démissionner le 18 janvier 1905 à la suite des remous causés par l'affaire des fiches qui avait déjà amené le général André à se retirer le 15 novembre 1904. C'est sous son ministère que se fit le rapprochement avec l'Italie et que se scella l'entente cordiale avec l'Angleterre. Il fut remplacé par Maurice Rouvier, le 24 janvier 1905. Entre temps, Emile Combes avait été réélu sénateur au renouvellement du 4 janvier 1903, étant président du Conseil, au premier tour de scrutin, par 723 voix sur 1.004 votants. Mais de retour à son banc de sénateur et malgré qu'il présidât toujours le groupe de la gauche démocratique, il ne joua plus de rôle politique de premier plan. Il vivait plus fréquemment à Pons, dont il était resté le maire.
- Il retrouva son siège de sénateur aux élections du 7 janvier 1912, au premier tour de scrutin, par 664 voix, sur 990 votants. Il eut l'occasion de se faire entendre dans la discussion du projet de loi relatif à la liquidation des congrégations (1913).
Il sortit de sa demi-retraite le 29 octobre 1915 où Aristide Briand, constituant un cabinet d'union nationale en raison de la guerre, lui confia le portefeuille de Ministre d'Etat. Il ne joua pas en cette qualité, de rôle particulier et démissionna le 12 décembre 1916, en même temps que le ministère. Il participa, en 1919, au débat sur les appellations d'origine des produits naturels ou manufacturés. Réélu au renouvellement du 9 janvier 1921, toujours au premier tour de scrutin, par 585 voix sur 992 votants, il mourut quatre mois plus tard, à Pons, le 24 mai 1921, à l'âge de 86 ans.
M. Alexandre Bérard, vice-président du Sénat, prononça son éloge funèbre à la séance du 25 mai. Ancien sous-secrétaire d'Etat dans le Ministère Emile Combes, il s'exprima ainsi : « Mes chers collègues, permettez-moi de rappeler en un souvenir ému, que j'eu l'honneur d'être le très modeste collaborateur de ce chef plein de bienveillance et d'une immense bonté. Cette collaboration restera pour moi l'honneur de toute ma vie, et c'est avec une orgueilleuse fierté que je vois les hasards du sort m'appeler du haut de ce fauteuil, au nom du Sénat, au nom du grand Conseil des communes de France, à saluer respectueusement la mémoire de celui qui fut un grand et bon citoyen, dévoué durant toute sa vie à la France et à la République. » Et la séance fut levée en signe de deuil.
Outre les ouvrages cités plus haut, Emile Combes publia : De l'état actuel de la médecine et des médecins en France (1869), Une campagne laïque (1904), Une deuxième campagne laïque (1905). Il écrivit de nombreux articles dans la presse dont quelques-uns furent très remarqués : Virgile, poète didactique et poète médecin ; Le saint-simonisme, etc.