top of page

La grotte de la Valié

                  L'histoire vaut d'être conté, avant que disparaisse les derniers témoins qui peuvent encore fixer le narrateur sur l'origine de ce monuments du à la piété mariale des habitants.

  Cette histoire véridique semble un peu merveilleuse parce qu'elle rappelle les grandes époques de foi du Moyen-Age, où l'on mêlait familièrement le surnaturel aux choses de la vie courante et où, sans être riches, les fidèles bâtissaient les cathédrales dédiées à Notre Dame. Les moindres désirs étaient confiés à Dieu et à Marie, sa sainte Mère, et les projets les plus hardis se réalisaient. La grâce de Dieu et le secours de Marie favorisaient visiblement toutes les entreprises de piété.

Pendant l'angélus

 

   - En 1877, vivaient à Roque courbe deux pieuses filles, les demoiselles Maraval, dites les '' cinq-six'', très dévouées à toutes les bonnes œuvres. Ce dévouement se perpétua jusque dans la tombe puisque en mourant, elles laissèrent leur maison à la paroisse pour y loger le vicaire.

  L'aînée, Marie, eut un jour une inspiration d'en-Haut, pendant la récitation de l'Angélus. L'idée lui vint, avec force, de faire construire une grotte de Lourdes sur la paroisse. Elle fit part de son idée à sa sœur Anne, dites ''l'Annillou'', qui l'approuva, et lui conseille d'en parler aux filles de La Valié.

  Il y avait à cette époque, dans le village de La Valié, à 800 mètres du bourg de Roquecourbe, dix filles dont le souvenir rappelle la parabole des dix vierges de l'évangile, avec à cette seule différence que toutes étaient sages. Dix filles laborieuses et remplies de piété, dans le cœur de qui le projet de Marie Maraval tomba comme dans une terre toute préparée et germa aussitôt.

 

On quête

 

   - Les dix filles de La Valié se concertèrent, approuvèrent le projet et décidèrent, séance tenante, de faire une quête entre elles pour couvrir une partie des dépenses. Chacune donna dix francs, ce qui représentait beaucoup de privation à cette époque, pour des pauvres filles de la campagne, mais la somme de cent francs n'était pas suffisante pour le seul achat des statues. La foi donnant du zèle et de l'audace aux plus timides, les dix filles allèrent tendre la main de porte en porte à La Valié, et dans les maisons amies de Roquecourbe. Elles recueillirent cent autres francs. Guidée par des personnes de bons conseils, elles allèrent à Castres, trouver un homme riche et charitable, Monsieur Périé, ( père du vénéré chamoine Périé, mort aumônier du refuge de Castres et directeur des pèlerinages diocésains à Lourdes).

 Monsieur Périé s'occupa de l'achat des statues et paya de sa bourse ce qui manquait, la dépense totale s’élevant à 254 fr.

 

Les préparatifs

 

   - L'emplacement actuel ayant été choisi, au milieu du village, il fallut préparer un plan.

Deux architectes offrirent leurs gracieux concours: Monsieur Jean-Louis Alibert, pharmacien

                                                                                  Monsieur Joseph Gaches.

  Monsieur Alibert avait toute sorte de recette dans sa boutique de pharmacien. Humaniste distingué, poète plein d'esprit et de talent, il s'adonnait volontiers aux œuvres sociales et de piété. Il avait fondé une société de Secours Mutuels, placée sous le patronage de la nativité de la Sainte Vierge; il s'intéressa vivement au projet de construction d'une grotte de Lourdes. Le terrain choisi étant en pente, il faudrait des escaliers pour accéder à la grotte; il voulut en fournir les degrés. Il fit démolir une muraille de son jardin, sur laquelle se trouvait de grosses pierres du Sidobre dont il fit don pour la construction de l'escalier.

  Monsieur Joseph Gaches, très bon chrétien, était d'un grand dévouement et d'une bonté proverbiale, trop bon même, au dire de quelques-uns. Il était en même temps très habile de ses doigts, ce qui lui permettait de rendre de grands services. Il fut adjoint à Monsieur Alibert pour préparer le projet de construction de la grotte.

  D'un commun accord, on choisit comme entrepreneur Monsieur Louis Guy, dit '' Lou Louis d'al maçou, ou Louis le maçon''. Celui-ci, avant d'entreprendre le gros œuvre, voulut visiter en compagnie de Monsieur Gaches une grotte qui existait déjà à Sainte Cécile de Labruguière. Au retour, à l'aide de son seul couteau , Monsieur Gaches fit le plan en creux sur une planche de bois, perdue depuis, mais qui est restée longtemps dans les servitudes de la maison Guy, rue de la rivière.

                                                                       

La construction

 

   -Le plan terminé on se mit à construire. Tous les habitants de La Valié furent terrassiers, des manœuvres et des maçons bénévoles, les dix filles du village à leur tête. Un routier de la place de la Mairie, Monsieur Henri Azéma, dit ''Poulisso'', alla chercher dans les environs de Caucalières, de grosses pierres du Causse dont on fit le revêtement extérieur de la grotte.

  Les escaliers, construits avec les pierres fournies par Monsieur Alibert présentent trop d’aspérités, furent recouverts en ciment comme les paliers qui forment les plates-formes d'accès à la grotte. Les travaux, exécutés dans le plus grand enthousiasme, furent terminés au mois de Mai 1877.

                        

L'inauguration

 

   - La grotte fut bénite d'une manière solennelle le dimanche 27 Mai 1877, par Monsieur l'Abbé Marty, chamoine honoraire curé doyen de Roquecourbe assisté par son vicaire, Monsieur l'Abbé Jules Laurens. La statue de la Vierge, déposée sur le sol, fut mise en place après la bénédiction par Louis le maçon, tandis que son jeune fils, Élie, tenait dignement sa veste à ses côtés.

  La cérémonie eut lieu dans l'après-midi, avec le concours de toutes les œuvres de la paroisse et l'assistance de tous les habitants de le contrée. Après la bénédiction des statues et du monument, Monsieur le Curé prononça une allocution de circonstance. Le chapelet fut récité avec une grande piété, et la cérémonie se termina par le chant du cantique de l'inauguration, composé spécialement par Monsieur Alibert, Pharmacien.

  La Grotte fut ornée de fleurs, de guirlandes, de verdure, et brillamment illuminée. Les maisons du village étaient toutes décorées de fleurs et de corde de buis, formant comme un joli parterre autour de la nouvelle grotte de Lourdes. Ce fut un beau jour pour la paroisse,et pour le village de La Valié en particulier. Ce fut un jour du ciel pour les demoiselles Maraval, dites ''les cinq-six'' et pour les dix filles de La Valié dont, parait-il, Monsieur le Curé disait, à la mort de chacune d'elles: Voilà une fleur de moins dans la paroisse.

 

Un sanctuaire vivant

  

   - Les chandelles éteintes et les guirlandes remisées, tout n'était pas fini. Les dix filles de La Valié ne l'entendaient pas ainsi: ce jour devait avoir d'heureux lendemains et un long avenir.

  Deux d'entre elles furent choisies pour être les gardiennes du nouveau sanctuaire. Elles avaient la maison à côté; c'était tout naturel. La fonction leur revenait de droit. Elles se nommaient Mélanie et Jeanne Gau, tantes du R.P. Ignace Gau, du Tiers-Ordre Régulier de Saint François d'Ambialet, missionnaire au Brésil, tantes également des Demoiselles Maria et Louise Calmet, les gardiennes actuelles (1939).

  Aussitôt après l'inauguration, la prière publique s'organisa à la nouvelle grotte. Une cloche fut apposée sur la maison des gardiennes et, chaque soir, pendant la belle saison , tout le monde fut invité à se réunir au pied de Marie Immaculée pour réciter la prière du soir, le chapelet et les litanies de la Sainte Vierge. Le village répondit avec empressement, et, il vint même, dans les premiers temps, des fidèles de Roquecourbe.

  Cette cérémonie n'a jamais été interrompue, et elle continue de jours (1939). Pendant toute la belle saison la gardienne tinte la cloche, et, avec la même fidélité, les habitants de La Valié se groupent autour de la Sainte Vierge pour la prier, la chanter et lui recommander toutes leurs intentions personnelles et celles qu'on leur confie.

  Depuis l'inauguration, la paroisse se rend tous les ans en procession à la grotte de La Valié, après les Vêpres de la fête du Très Saint Rosaire.

 

Faveurs accordées

 

   -Qui pourra dire les réponses de la Sainte Vierge à toutes les prières qui lui sont adressées devant ce monument de La Valié?

  Seuls, ceux qui en sont bénéficiaires pourraient parler. Mais, les grâces du Ciel sont d'ordre trop intime, habituellement pour qu'on puisse les reproduire au grand jour. Ne doutons pas que la Saint Vierge entende nos louanges et qu'elle réponde à nos demandes.

  On dit que la pluie menaçait sérieusement de contrarier la fête de l'inauguration de la grotte. Quelques ondées même étaient tombées le matin. Des prières pressantes furent adressées à la Sainte Vierge, et la menace fut écartée.

  Des pêcheurs, dit-on, seraient revenus à Dieu après une visite et une prière faite avec foi à la grotte. Certains en on fait l'aveu. La vérité est que nous devons beaucoup à la Sainte Vierge et qu'elle exauce facilement toute prière, surtout celles des pêcheurs. Ce que nous lui devons, nous le saurons, au juste, plus tard, quand nous pourrons lire le grand livre de la vie.

 

Visites

 

   - Ce ne sont pas seulement les habitants de La Valié qui vinrent visiter le grotte. Dès le début, on prit l'habitude de s'y rendre de Roquecourbe en promenade le dimanche, et d'y prier.

  Des environs également, on choisi La Valié comme but de  promenade et de prières.

  Aux jours de fêtes ou à l'occasion des réunions de famille, on prit facilement le chemin de la grotte, qui devint ainsi comme un modeste centre de pèlerinage.

  En 1898,Mgr Jean-Emile Fonteneau, archevêque d'Albi de passage à Roquecourbe, voulut se rendre à La Valié. Il alla s'incliner et prier devant la grotte.  Afin d'encourager la piété des habitants et laisser un souvenir de son passage, il accorda 40 jours d'indulgence à tous les fidèles qui réciteraient un Pater et un Ave devant la Vierge de La Valié.

 

Les grands anniversaires

  

   - La messe n'avait jamais été célébrée à l'autel de la grotte. IL fallut, pour cela, arriver au vingt-cinquième anniversaire de sa fondation.

  A cette époque, c'est à dire au mois de Mai 1902, Monsieur l'Abbé Rieunier, curé doyen de Roquecourbe, aidé de son vicaire Monsieur l'Abbé Émile Lacan, organisa des fêtes pour commémorer cet anniversaire. Les cérémonies eurent lieu le lundi, afin de ne pas désorganiser les offices du dimanche à l'église.

  Une procession fut faite et la messe fut dite aux pieds de la Sainte Vierge. La population y vint en foule, et les échos de  Saint Martin retentirent à nouveau des chants du cantique de l'inauguration.

  Au mois de Mai 1927, le cinquantenaire fut célébré d'une manière grandiose. Monsieur le chamoine Rieunier, curé de la paroisse voulut marquer cet anniversaire par un triduum qui fut prêché par le R.P. Ignace Gau, enfant de La Valié. Ce dernier parla à la Sainte Vierge pendant trois soir à l'église à l'occasion de la retraite de la première communion. Il fut parait-il, très éloquent , car les personnes d'un âge avancé se souviennent encore de ses sermons qui firent une profonde impression sur l'auditoire. Le domaine de la grotte avait été brillamment décoré et illuminer par le vicaire, Monsieur l'Abbé Alphonse Gontier.

 

  La messe fut célébrée à l'autel de la grotte, le lendemain de la première communion vinrent en procession à cette messe d'action de grâce, accompagnés d'une foule considérable de fidèles. Depuis la vie spirituelle continue modestement à La Valié en attendant d'autres anniversaires.

  Image de Lourdes, la grotte de La Valié voit de rares visiteurs en hiver. Quelques habitants du village ou des voyageurs se signent ou se découvrent en passant devant la grotte Quelques-uns, plus rares, s'arrêtent, le temps de dire un Pater ou un Ave. On entend plus en cette saison que le bruit du vent dans les charmilles, qui fait penser en ce lieu au bruissement des ailes des anges gardiens de la grotte.

  En été, la cloche se fait entendre à nouveau, et les fidèles du hameau reviennent auprès de Marie Immaculée égrener des chapelets comme leurs devanciers il y a plus de soixante ans, comme Bernadette à Lourdes, à qui la Sainte Vierge fit la promesse de la rendre heureuse, non pas dans ce monde mais dans l'autre.

  Fidèles serviteurs de Marie, les habitants de La Valié gardent vivante dans leurs cœurs l’espérance de l'humble Bernadette.    

 

 

Le Lis de La Valié

 

             Cantique de l'inauguration de la grotte de La Valié composé par Jean-Louis Alibert pharmacien et poète.

 

1° Du haut du ciel la vierge immaculée

    Jette un regard miséricordieux

    Sur cette terre aride, désolée,

    Où l'appelaient nos soupirs et nos vœux 

                      chœur  

2° Elle a choisi le hameau pour demeure.

    Faveur insigne et prodige d'amour,

    Elle veut être avec  nous à toute heure

    Et la nuit et le jour. (bis)

 

3°Nous l'avons vu un jour à Massabielle,

    Et qui pourrait ne pas s'en souvenir?

   Mais ce n'est pas encore pour elle.

   C'est parmi nous qu'elle daigne venir.

 

4°Humble, ignoré, à l'ombre du mystère,

   Marie aimait à méditer la loi;

   Elle aime encore l'asile solitaire

   Mille fois plus que le palais d'un roi.

 

5°Voix du vallon et voix de la colline

   Éveillez-vous à nos accord joyeux

   Pour exalter dans sa bonté divine

   Celle qui vient habiter dans ces lieux.

 

6°Dans les combats, les luttes de la vie

   Si quelquefois le courage faiblit,

   Que nos regards se tourne vers Marie;

   C'est notre mère et son bras nous suffit.

 

7°Là-haut, sur nous, si la tempête gronde,

   Si contre nous les flots sont soulevés,

   Marie est là, son fils sauva le monde;

   Prions Marie et nous serons sauvés.

 

8°Marie au ciel est l'étoile qui brille

   Pour éclairer notre route d'ici bas.

   Heureux le peuple, heureuse la famille

   Dont ce flambeau sert à guider nos pas!

 

9°Puisqu'elle fait ses plus chères délices

   D'être avec nous, donnons-lui notre cœur;

   Après Jésus, qu'elle en ait les prémices;

   N'est-elle pas la mère du Sauveur?

 

10°Ah! Qu'il fait bon dans l'humble solitude,

   Loin des vains bruits et sous l'œil maternel!

   Là sans remords et sans inquiétude

   L'âme savoure un avant-goût du ciel

0507.jpg
bottom of page